Carl Sandburg
Anamosa | 2016 | 17,50 €
Rarement la lecture d’un documentaire historique m’avait remué à ce point, et le sinistre écho des »événements » qui sont survenus aux États-Unis cette année m’a semblé être éminemment significatif : il était temps de lire ce grand classique de Carl Sandburg, enfin disponible en français grâce aux éditions Anamosa qui ont apporté (comme d’hab) un vrai soin à cette traduction en y apportant plusieurs éléments de recontextualisation super bienvenus.
Chicago, 27 juillet 1919, un jeune afro-américain se noie, apeuré par une bande d’ados blancs qui le menacent et le caillassent car, il faut le rappeler, la plage était réservée aux blancs, pardi. Le tout devant la police qui ne bougera pas le petit doigt. La suite de cette histoire est aussi tragique que son début : 38 morts (dont une majorité d’afro-américains), 500 blessés, des quartiers bousillés, 13 jours d’émeutes qui touchent des dizaines d’autres villes des USA. L’histoire ne fait que balbutier, parfois. Le bouquin reprend le rythme des articles que Carl Sandburg écrivit pour le Chicago Daily News sur la condition des afro-américains à l’époque, et il commença ses écrits peu de temps avant l’assassinat du jeune Eugene Williams. Les événements lui donneront de multiples raisons de s’atteler à un vaste travail de reportage sur le terrain, qui s’apparente tantôt à l’investigation, tantôt à un travail sociologique.
Le mouvement que représente Black Lives Matter ne prend pas une ampleur soudaine depuis les assassinats de ces derniers mois, de ces dernières années : il est la suite d’une longue histoire que l’on croît connaître mais dont les jalons sont nombreux, et celui posé par le journaliste, écrivain trois fois prix Pulitzer et poète Carl Sandburg, qui traite du Red Summer de 1919 (il y a un siècle, vous aurez déjà fait le calcul) est effarant en tous points.