L’Apocalypse | 2012 | 13 €
On pourrait imaginer qu’il n’y a guère de pertinence à compiler aujourd’hui (enfin : il y a 8 ans, déjà, mais vous voyez où je voulais en venir…) les chroniques d’un journaliste de 87 balais écrites il y a 45 ans, et à ce qu’elles se retrouvent parmi les propositions d’Adak… Mais voilà : la contemporanéité des écrits de DDT éclabousse, et sa plume, virtuose, inspirée et sauvage dès le premier jour, n’ont pas pris une ride, selon l’expression consacrée.
Delfeil de Ton, né en 1934, est repéré par Cavanna (qui signa d’ailleurs la préface de ce bouquin), et démarre tôt une activité de rédacteur pour la toute première mouture de Hara-Kiri. Il enchaîne les coups de gueule et les réactions à la connerie du monde dans les page de Hara-Kiri Hebdo (qui deviendra plus tard Charlie Hebdo), pour Libé, et en 75, démarre une collaboration avec Le Nouvel Observateur, au sein duquel il est souvent taxé de caution d’extrême de l’extrême gauche, au bas mot.
« Les Lundis de Delfeil de Ton » débute sur les chapeaux de roue, et la sauvagerie n’a jamais ralenti, s’en prenant à tout sur son passage ; car tout mérite d’être piétiné : la bêtise, la médiocrité, l’injustice, tout est bien trop présent en ce monde pour que DDT tienne sa langue.
Après avoir côtoyé Bretécher lors de son arrivée au canard, il fait rentrer Reiser en 81 dans les pages de L’Obs, et trois ans plus tard, Wolinski.
Ce premier volume (1975-1977) d’une longue série peut sembler distante dans les années. Dans les faits et dans les sujets qu’elle observe, elle n’a jamais été aussi moderne : on remplace Giscard et ses sinistres par d’autres fanfarons, mais les monstruosités commises n’ont finalement guère changé.
L’Apocalypse, cette si belle maison d’édition créée par le tout aussi essentiel Jean-Christophe Menu il y a une petite dizaine d’années, est actuellement dans une phase de sommeil profond. Espérons que le réveil attendu nous agrémente de la suite de cette somme à venir.